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Futurs-ACT et le Tremplin 2023 : une rencontre sur le changement climatique - Regards croisés entre des étudiants de Master 2 et une chercheuse en Design fiction

Au cours de l'événement Tremplin 2023 organisé par le réseau régional de recherche Futurs-ACT, deux étudiants en Master 2 (Agathe Lacombe et Evan Le Poul) ainsi qu'une chercheuse (Stéphanie Cardoso) ont croisés leurs regards pour nous parler du changement climatique et de leur perception de ce changement. Ces ressentis et idées personnels nous aiguillent sur la façon dont la crise climatique que nous vivons est reçue et interprétée par les jeunes et sur les différentes façons de représenter ce changement, en passant notamment par l'imaginaire.

Actu-Congrès 30 août 2023

Bonjour à toutes et à tous et Bienvenue !

Aujourd'hui, Terres du Passé a le plaisir de vous partager deux nouvelles vidéos du Tremplin 2023 organisé par Futurs-ACT !
Si vous lisez cette actualité, vous avez probablement déjà fait un petit tour par les précédentes sur le sujet (ici, ici, , ou encore ici) et Futurs-ACT ne vous est plus inconnu ! Si ce n'est pas le cas, n'hésitez pas à aller sur les pages que je viens de citer pour découvrir ce réseau régional de recherche (pour rappel, il y a une vidéo dans cet article qui explique un peu plus en détails ce qu'est Futurs-ACT). Si vous vous intéressez aux questions de changement climatique en Nouvelle-Aquitaine, croyez-moi, ça vaut le détour !

Mais passons ! Et continuons notre chemin sur les discours de nos jeunes amis Agathe Lacombe et Evan qui nous partagent avec passion leurs perceptions sur le changement climatique en cours !

Agathe Lacombe et Evan Le Poul nous parlent de leur perception du changement climatique

Résumé (assez) court des propos tenus par Agathe et Evan :

Agathe Lacombe :
Cette année est marquée par le terme accélération : il faut accélérer la transition écologique.
Et cette volonté est vertueuse et nécessaire car le réchauffement climatique n’attend pas.
Mais l’accélération est aussi une cause du réchauffement, comme l’a montré Harmunt Rosa : “Nous sommes dans un régime temps lié à la croissance”.

Aujourd’hui, même si on a plus de temps libre, on ne prend plus le temps de prendre le temps.
Amazone émet 71 millions de tonnes de CO2 par an.
En comparaison, la Roumanie émet 73 millions de tonnes de CO2 par an.

Le climat s’accélère et n’attend pas. Nous devons nous adapter plus rapidement à ces effets. Il faut accélérer la décélération de nos modes de vie. Il faut agir vite mais avec une vision de long terme et des outils adaptés.

Evan Le Poul :
Le rapport du GIEC, c’est bien, mais nous maintenant on veut agir, on veut bouger et bouger vite. Une frustration lourde à porter par des jeunes qui pensent que l’inertie est de la pure mauvaise foi, de la pure mauvaise volonté.

Confronté à la réalité, je me suis rendu compte que c’était plus compliqué que ça : c’est incroyablement dur de faire advenir quelque chose.
Après une année dans une structure des Nations Unies, même si rien de bouge mais que tout le monde s’agite, je suis perdu. Perdu parce qu’au bout d’un an je ne sais plus où placer mes efforts. Il nous manque une direction, un horizon, une boussole commune qui nous donne envie de lutter encore et encore.

Perte de sens, pourquoi je me lève le matin… les cinq sens qui nous amènent vers la perte de sensibilité désastreuse.
L’absence de récit collectif sape nos efforts. Il faut articuler les échelle, créer du consensus, du débat entre chacun.
Pour créer une culture collective, agir sur les imaginaires constitue le premier des quatre principes fondamentaux de la conduite de changement.

Il faut nous dépêcher de prendre le temps d’imaginer ensemble l’horizon vers lequel nous voulons toutes et tous aller.

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À leur suite, Stéphanie Cardoso, maîtresse de conférences, nous a parlé de Design fiction et d'imaginaire pour susciter l'intérêt et la compréhension de la société vers le changement climatique en cours.

Stéphanie Cardoso nous parle de Design fiction pour intégrer le changement climatique

Court résumé de la vidéo :
Le Design fiction va permettre de se projeter par le biais de méthodes créatives et de récolte de données en sciences humaines et sociales pour mieux appréhender le futur. “Ce qu’on veut, c’est du désirable, parce que ces changements [climatiques] amènent beaucoup de détresse et d’angoisse. [...] Donc [..] le design fiction a probablement un rôle à jouer [...] dans l’aide à la prise de décision et de représentation de l’avenir.”

“Accélérons, décélérons, créons des itérations, [...] le changement d’échelle va favoriser la critique et permettre de croiser les regards”

“La diffusion d’images de chocs de la part des médias et la sensibilisation quotidienne n’outille pas plus les citoyens et contribue aussi à créer de la frayeur.”

Yoann Frontout :
“Réussir à accélérer nos actions tout en décélérant nos modes de vie. [...] ou l’idée d’Evan [...] de nous dépêcher de prendre le temps d’imaginer.”

“L’idée d’une long emergency de James Howard Kunstler [...] qu’on peut traduire par l’oxymore “longue urgence”. [...] Comment on doit travailler avec un déséquilibre évolutif permanent.”

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Commentaire de Terres du Passé sur le contenu de ces regards croisés

Ces deux vidéos ne manquent pas d'apporter un regard différent à la thématique du changement climatique telle que l'aborde Terres du Passé habituellement. Paléoclimatologue de formation, Docteur en sédimentologie, scientifique dans l'âme, passer par les ressentis pour parler du climat me semble assez peu... conforme à la méthode classique. Tout comme parler d'imaginaire pour donner du sens au changement climatique. Une notion que, naturellement, j'aurais eu tendance à rejeter. Et pourtant, c'est bien en essayant d'éveiller votre imaginaire que je vous parle dans mes vidéos.

C'est pour cela que je m'efforce d'utiliser et de produire un maximum d'illustrations et que nous faisons des représentations paléoenvironnementales dans nos articles scientifiques (c'est-à-dire des représentations des paysages dans le passé, avec des climats et des niveaux marins différents par exemple). Parce qu'il faut éveiller l'imaginaire pour susciter la compréhension des conditions à une autre époque. Mais n'oublions jamais d'y intégrer les données scientifiques, car sans elles, la fiction n'est que cela : de la fiction.

Et certaines fictions peuvent sembler si réelles, si fortement étaillées par des données pseudo-scientifiques, qu'elles peuvent sembler justes sans l'être pour autant. Je me souviens encore de la première fois que j'ai lu "De la Terre à la Lune" de Jules Verne. J'étais encore au lycée (donc plus si jeune que ça, mais quand même) et Jules Verne apportait une telle profusion de détails, une telle quantité de données chiffrées, il écrivait avec un tel charisme et une telle certitude dans l'exactitude de ses propos que, si je n'avais eu la connaissance de l'impossibilité que cela représentait, j'aurais pu croire qu'en effet, envoyer un boulet de canon avec deux hommes à l'intérieur pour faire le tour de la Lune et revenir suivant les caractéristiques qu'il donnait, et avec les quantités de combustibles qu'il envisageait, était chose possible (si vous n'avez jamais lu ce roman, lancez-vous, parce qu'il est vraiment génial. La façon dont il imagine les solutions face aux problèmes que rencontreront ces premiers "astronautes" est vraiment exceptionnelle et avant-gardiste pour l'époque. N'oublions pas que Jules Verne a vécu entre 1828 et 1905. Le premier planeur fonctionnel date de 1849 et le premier avion à moteur capable de voler de 1903...).

L'idée de Jules Verne était novatrice. Elle a permis, par l'imaginaire, de mettre dans la tête des humains - bien avant que nous en soyons capables - l'idée qu'il était possible d'atteindre la Lune. Mais pour autant, son récit était une fiction. C'est la Science, l'accumulation des connaissances au fil des décennies (et même des siècles) et l'acharnement de personnes passionnées qui ont permis de donner une réalité à cette fiction. Alors oui, utiliser l'imaginaire pour donner du sens au changement climatique dans les esprits des citoyens, c'est une idée. Et une bonne idée. Mais il faut la mener avec précaution et avec le soutien de la Science.

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